Sud-Ouest en rouge et blanc

Sud-Ouest : 50 caractères trempés de rouge et de blanc
Robots, drones, applications, progiciels, clouds, sécurités digitales…
Les technologies numériques envahissent l’univers du vin, de la culture de la vigne à l’élaboration et au commerce du vin.

 

50 Caractères trempés de rouge et de blanc… Pourquoi cinquante ? Le pari était le suivant : rendre compte de la formidable diversité culturale, culturelle, gustative et humaine du Sud-Ouest viticole, tout en restant concis. D’Irouléguy à Marcillac, près de Rodez, de Bergerac à Gaillac, nous avons voulu mettre en avant les grands modèles qui ont influencé toute une génération (parfois plusieurs) de vignerons, et pressentir les cuvées qui seront les classiques de demain.

Chaque vin de ce palmarès propose un paradigme original. C’est une collection de tempéraments qui ne regardent ni vers Bordeaux, ni vers la Bourgogne, ni vers le Nouveau Monde ou quelque autre supposé eldorado du vin de demain. L’idiosyncrasie, c’est la grandeur du Sud-Ouest. Ce n’est ni une question de taille (Plaimont produit 40 millions de bouteilles par an sur plus de 5.000 hectares ; le Clos Joliette et Les Pentes de Barène exploitent moins de deux hectares en vignes), ni une question de prix (la moitié des vins retenus dans notre sélection ne dépassent pas le seuil des 15 euros).

Quelle place pour le Sud-Ouest du vin, dans un marché globalisé qui a fragilisé les logiques de commercialisation régionales ? Les appellations sont petites, dispersées ; elles se regroupent en différents pôles : les bassins de l’Adour, de la Garonne et de la Dordogne, le “Haut-Pays” du Lot, du Tarn et de l’Aveyron. La géographie, mais aussi l’histoire et ses découpages administratifs, ont modelé ces entités parfois éloignées de plusieurs centaines de kilomètres. Le regroupement des régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées changera-t-il la donne, en termes de politique de production et de communication, pour les appellations de cette dernière ? Si le Languedoc viticole est en perpétuelle ébullition, les contours de ses appellations se redessinant à un rythme soutenu (voir La RVF n° 588), les vignobles du Sud-Ouest apparaissent plus stables. Le seul événement majeur de ces dernières années aura été la “fournée” de huit anciens VDQS promus AOC en 2011.

FER SERVADOU ET ABOURIOU
Au niveau collectif, les appellations semblent avoir réalisé que le salut viendra de l’affirmation de l’originalité, de la spécificité de chaque vignoble. Les cépages autochtones sont systématiquement mis en avant, exhumés des archives s’il le faut… Le malbec à Cahors, le tannat à Madiran ont montré la voie. La négrette à Fronton, le fer servadou à Marcillac, l’abouriou dans le Marmandais ont suivi. D’autres arrivent, comme le canaril en Ariège, ou le manseng noir dans les vignobles de l’Adour. Et nous ne parlons que des cépages rouges ! Jurançon et ses mansengs, Gaillac et ses mauzacs, loin de l’œil et autres ondenc brillent d’une originalité peut-être encore plus flamboyante.

Cette prise de conscience de la valeur du patrimoine ampélographique (les cépages dits “modestes”, chers à Robert Plageoles) s’accompagne, et c’est heureux, de modèles de production rénovés, repensés, tournés vers une véritable recherche de qualité. Les meilleurs domaines portent une attention de plus en plus grande à la vie des sols et aux problématiques du végétal. Ils font réfléchir l’ensemble de leurs collègues, montrant les limites de certaines modes et techniques de vinification qui gomment l’identité du raisin : sirènes du vin rosé, thermovinification, recherche des arômes thiolés dans les blancs quel que soit le cépage, aromatisation aux morceaux de chêne, levurage systématique, soit à notre sens autant de pratiques difficilement compatibles avec un discours collectif vantant la “typicité” ou le “terroir”…

UNE NOUVELLE GOURMANDISE
Quelles sont les tendances dans le verre ? Pour les rouges, qui dominent en termes de volume et d’image, la situation apparaît contrastée : on est frappé par la richesse et la diversité grandissante des propositions. Une nouvelle gourmandise apparaît, s’éloignant de l’image de vins austères, structurés jusqu’à la rugosité. C’est frappant à Cahors ou à Bergerac. Qu’on se rassure, il existe encore des grands vins de garde, plus mûrs et fruités que naguère, mais toujours capables d’évoluer sur vingt ans et plus (les madirans d’Alain Brumont, les cahors du Clos de Gamot ou de Jean-Luc Baldès…). Dans cette veine du vin de garde, de nouveaux classiques sont même apparus, tel le Clos Baquey d’Elian Da Ros.

Notre sélection de blancs secs se concentre sur des vins capables de donner un plaisir immédiat, des vins ayant en commun une franche vivacité fondue dans une matière généreuse, ouverte, expressive. En dehors des mauzacs élevés sous voile, magnifique spécialité gaillacoise, les blancs pyrénéens de Jurançon et d’Irouléguy paraissent les mieux armés pour affronter une garde de quelques années.

DÉGUSTATION : DES LIQUOREUX HORS CLASSE
Le lecteur constatera que les notes les plus hautes vont aux vins liquoreux. Pourquoi ? Parce que ces cuvées touchent à l’exceptionnel, au sens littéral de ce terme galvaudé, quand les vignerons ont les moyens et l’envie de se livrer à ce corps-à-corps avec l’arrière-saison, lors de vendanges repoussées parfois jusqu’en décembre.

Malgré la désaffection qui pénalise aujourd’hui les vins sucrés, ces derniers possèdent une dimension de témoignage supplémentaire, à la fois de l’implication vigneronne et du caractère du millésime. L’équilibre aérien d’un petit manseng passerillé, entre truffe, épices, exotisme du fruit et fraîcheur éblouissante, la suavité subtilement végétale, safranée, d’un grand gaillac confit par le vent d’Autan : ces goûts sont irremplaçables. Il ne faut pas, comme ça s’est passé ailleurs (nos regards se tournent vers l’Anjou), que ces vins disparaissent !

Cette sélection opérée par Pierre Citerne est nourrie par trois années de fréquentation des vins du Sud-Ouest, notamment lors de dégustations syndicales, de visites de domaines, de dégustations pour La RVF et nos guides vert et rouge.

Sources : www.larvf.com

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